Le Nouveau Roman

Modifié par Mmedigeon

I. Des prédécesseurs au Nouveau Roman

La rupture que crée le Nouveau Roman se fait en réaction aux romans traditionnels hérités du XIXe siècle, les romans réalistes surtout. Mais le renouvellement du roman a déjà commencé au début du XXe siècle, avant l’émergence du Nouveau Roman. Ces romanciers, tels que Proust, Joyce, Kafka ou Faulkner ont déjà ouvert de nouvelles voies. La « nouveauté » du roman d’après-guerre n’est donc pas si radicale que pourrait le laisser le penser le nom du groupe.


II. Le Nouveau Roman

Naissance

Le Nouveau Roman est un mouvement romanesque des années 1950-1970 qui regroupe des écrivains dont les positions esthétiques n’étaient pourtant pas toutes similaires. Le point commun de départ à tous ces romanciers du Nouveau Roman est le fait d’être publiés dans la même maison d’édition, les « éditions de Minuit », dirigées par Jérôme Lindon.

Les principaux représentants

  • Alain ROBBE-GRILLET, Les Gommes, 1953 La Jalousie, 1957.
  • Claude SIMON, La Route des Flandres, 1960 Les Géorgiques, 1981. Il a obtenu le prix Nobel de littérature en 1985.
  • Michel BUTOR, L’Emploi du temps, 1956 La Modification, 1957.
  • Nathalie SARRAUTE, Tropismes, 1938, Martereau, 1953, Le Planétarium, 1959, Les Fruits d’or, 1962.
  • Marguerite DURAS, Moderato Cantabile, 1958, Le Ravissement de Lol V. Stein, 1964.

Notons que certains écrivains se sont ouverts à d’autres genres et formes que le roman :

  • Sarraute et Duras ont composé des œuvres théâtrales ;
  • Robbe-Grillet et Duras se sont essayés au cinéma.

Des textes théoriques, proches de « manifestes » du mouvement :

Des textes théoriques importants ont défini les contours du mouvement, notamment L’Ère du soupçon de Nathalie Sarraute (1950), Pour un nouveau roman d’Alain Robbe-Grillet (1955), Essais sur le roman de Michel Butor (1955).

L’esthétique du Nouveau Roman

Nathalie Sarraute est souvent rattachée au mouvement du Nouveau Roman.

En effet, de nombreux éléments définissant l’esthétique du Nouveau Roman se retrouvent dans ses textes. Les éléments traditionnels de la narration sont déconstruits, remis en question. Nous retrouvons la plupart de ces caractéristiques romanesques dans ses œuvres théâtrales.

Voici quelques caractéristiques du Nouveau Roman :

  • La fin de l’intrigue : il n’y a plus de narration traditionnelle (suivant un schéma narratif), mettant en avant l’action, se déroulant de façon linéaire et chronologique. L’ « histoire » n’est plus qu’accessoire, c’est un prétexte.
  • L’effacement du personnage : les romanciers ôtent au personnage toutes ses caractéristiques traditionnelles héritées du roman balzacien (physique, nom, passé, caractère, épaisseur psychologique). Le « héros » n’existe plus. Le personnage est une « notion périmée », tout comme l’histoire pour Robbe-Grillet (Pour un Nouveau Roman). Nathalie Sarraute résume ainsi cette déconstruction du personnage : « Il a, peu à peu, tout perdu : ses ancêtres, sa maison soigneusement bâtie […], ses propriétés et ses titres de rente, ses vêtements, son corps, son visage, et ce bien précieux entre tous, son caractère qui n’appartenait qu’à lui, souvent jusqu’à son nom. » (L’Ère du soupçon)
  • La prolifération des choses, des objets : il ne s’agit plus de proposer de longues descriptions de ces objets, comme les romanciers réalistes ont pu le faire, afin de leur donner un poids réaliste ou symbolique, mais de manifester le poids menaçant de ces objets dans un univers déshumanisé. Les choses prennent le pas sur les personnages.
  • Une énonciation problématique : les marques de l’énonciation (qui parle ? à qui ?) ainsi que celles de la focalisation (d’où la scène est-elle perçue ?) sont brouillées dans le Nouveau Roman. C’est ce trouble qui fait que le Nouveau Roman est parfois appelé « l’École du regard ».
  • Un appel à la collaboration du lecteur : le lecteur, qui s'identifiait au personnage sans se poser de questions, modifie sa position et porte un regard critique sur le personnage et l'oeuvre.


N.B. : Cette synthèse s'est appuyée sur l'œuvre d'Yves STALLONI, Écoles et courants littéraires, Lettres Sup, Armand Colin, 2005.

Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr
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